La disparition de la Nouvelle-France puis l’indépendance des treize colonies anglaises, la Révolution et les Guerres d’Empire en Europe, balayant les anciens régimes, ont fait apparaître un « monde nouveau » de part et d’autre de l’Atlantique. L’image de l’Amérique du nord en France en sera profondément modifiée.
L’oeuvre de Chateaubriand (Atala principalement) en est certainement à la source, magnifiant une nature inviolée, grandiose et sauvage, accordant une place de choix aux Amérindiens et n’oubliant pas les marques de la présence française (évangélisation, père Aubry). Le romantisme joue ici un rôle fondamental et, durant plusieurs décennies, va revêtir les lettres et les arts d’une vision positive et volontiers larmoyante d’un monde indien, appelé à disparaître.
Fort importantes furent à ce titre les images rapportées par les peintres-voyageurs européens (Bodmer au premier rang), arpentant ces régions à l’instar de leurs prédécesseurs en Orient. Ces premières « vues », sinon réalisées du moins esquissées sur place, vont jouer un rôle primordial dans la diffusion d’une nouvelle image, sous la forme d’illustrations (parfois de grande qualité) de récits de voyages publiés et diffusés.
Les visites indiennes (Osages, Oneidas) connaissent également un franc succès et préfigurent les grandes exhibitions de la fin du siècle. La presse et les arts en font volontiers écho, témoignant ainsi de l’intérêt du public pour des populations en contact avec le monde français depuis longtemps.
Certes disparue, la Nouvelle-France est devenue une Amérique de francophones dont l’image est désormais limitée à certains thèmes : Franco-américains du nord, intimement liés au monde indien et souvent métissés, Louisianais et « aristocrates » du sud, émigrés récents (colonie bonapartiste du Champ d’Asile).
Nombreux en sont les exemples, et sur bien des supports : peinture, sculpture, décor d’architecture, papiers peints, gravures et dessins d’Epinal, décors d’intérieur (comme les fameuses pendules dites à l’Indienne), figurines et jouets et, bien entendu, les pièces musicales et spectacles (dansés ou joués) issus de romans ou faits historiques (Le dernier des Mohicans fut certainement la source la plus célèbre).
Mais après le milieu du siècle, cette vision, réelle ou imaginée, sera de plus en plus dominée par la présence de la jeune République anglo-américaine, son développement, ses habitants, le gigantisme de la nature qu’elle prétend « découvrir » et qu’elle commence à occuper. La guerre de Sécession et la conquête de l’Ouest qui lui succède auraient pu effacer des mentalités françaises l’image de cette Amérique francophone. Elle perdurera cependant au travers de faits marquants, pour certains jusqu’au début du XXe siècle (évangélisation en territoire indien, révoltes des Métis dans le Canada occidental, luttes des Cajuns de Louisiane pour préserver leur langue et leur culture, etc.).