Jésuites martyrisés par les Iroquois, 1664
Grégoire Huret (1606-70)
In : François du Creux (SJ), Historiae Canadensis, 1664
Paris, BNF - Estampes
Depuis les débuts de la Conquête des Amériques, les ordres missionnaires ont joué un rôle primordial dans le rassemblement des informations sur les sociétés indigènes et leur environnement. À l’instar des Franciscains, des Dominicains et des Augustins, les Jésuites, arrivés plus tardivement, vont activement participer à ce mouvement, notamment en Amérique française.
C’est en 1611, près de 50 ans après leur entrée en Amérique du Sud (Pérou, 1566), que s’installent les premiers Jésuites en Nouvelle-France : Pierre Biard et Énémond Massé. Une deuxième tentative, plus heureuse aura lieu dès 1625 : Pierre Coton, Enémond Massé, Gabriel Lalemant et Jean de Brébeuf. Dès lors, l’évangélisation des Indiens et le maintien de la Foi sera plus particulièrement confiée à Compagnie de Jésus, qui en assure le monopole à partir de 1632.
Dans un contexte de guerre sauvage entre les Iroquois et les Hurons (alliés des Français), cet apostolat coûtera la vie à un certain nombre de Jésuites qui, faits prisonniers, seront torturés avant d’être mis à mort.
Cette gravure, par Grégoire Huret (1606-70), issue de l’Historiae canadensis de François de Creux (1664), relate les martyres subis par plusieurs d’entre eux entre 1646 et 1650. Respectant les conventions classiques en la matière (paysage bucolique, élégance des personnages, attitudes maniérées), l’auteur de la gravure a ici réuni des faits distincts par le temps, le lieu et l’action : dix personnes (religieux et laïcs) sont donc représentées et signalées par un numéro: Anne de Nouë de Champagne, Isaac Jogues et ses deux compagnons, Antoine Daniel, Jean de Brebeuf, Gabriel Lalemant, Charles Garnier, Noël Chabanel et l’Algonquin Joseph Onahare. Chaque martyr se voit ainsi attribué une partie de l’espace de la gravure, selon une progression dramatique partant d’un fond peu visible vers le premier plan, où l’horreur et la violence éclatent à la face du spectateur. Plusieurs «Passions» sont alors réunies, illustrant avec luxe de détails bourreaux et victimes, et surtout la nature des supplices (fusillé, brûlé, tué à coup de hache, ébouillanté, découpé en lanières), d’ailleurs décrits en latin dans la légende associée à la gravure.
Largement diffusés par les Relations Jésuites, les récits de martyres semblent avoir connu un certain succès en France, où se mêlaient probablement admiration devant le courage des missionnaires et voyeurisme face aux tortures qu’ils subissaient. Cette tradition de représentation du martyre est évidemment ancienne dans l’art religieux catholique. Cependant transposée en d’autres lieux et époques, elle identifie de nouveaux bourreaux: non plus Romains, Juifs ou Barbares, mais cette fois Indiens. Enfin, une dimension politique doit être aussi signalée : les meurtriers – Iroquois – ennemis des Français, sont soutenus et armés par les Britanniques.
De cette gravure est issu le grand tableau réalisé en 1925 pour l’Hôtel-Dieu de Québec, par Sœur Marie de l’Eucharistie (Elmina Lefebvre, 1862-1946), aujourd’hui au Musée de la Civilisation à Québec.
Depuis les débuts de la Conquête des Amériques, les ordres missionnaires ont joué un rôle primordial dans le rassemblement des informations sur les sociétés indigènes et leur environnement. À l’instar des Franciscains, des Dominicains et des Augustins, les Jésuites, arrivés plus tardivement, vont activement participer à ce mouvement, notamment en Amérique française.
C’est en 1611, près de 50 ans après leur entrée en Amérique du Sud (Pérou, 1566), que s’installent les premiers Jésuites en Nouvelle-France : Pierre Biard et Énémond Massé. Une deuxième tentative, plus heureuse aura lieu dès 1625 : Pierre Coton, Enémond Massé, Gabriel Lalemant et Jean de Brébeuf. Dès lors, l’évangélisation des Indiens et le maintien de la Foi sera plus particulièrement confiée à Compagnie de Jésus, qui en assure le monopole à partir de 1632.
Dans un contexte de guerre sauvage entre les Iroquois et les Hurons (alliés des Français), cet apostolat coûtera la vie à un certain nombre de Jésuites qui, faits prisonniers, seront torturés avant d’être mis à mort.
Cette gravure, par Grégoire Huret (1606-70), issue de l’Historiae canadensis de François de Creux (1664), relate les martyres subis par plusieurs d’entre eux entre 1646 et 1650. Respectant les conventions classiques en la matière (paysage bucolique, élégance des personnages, attitudes maniérées), l’auteur de la gravure a ici réuni des faits distincts par le temps, le lieu et l’action : dix personnes (religieux et laïcs) sont donc représentées et signalées par un numéro: Anne de Nouë de Champagne, Isaac Jogues et ses deux compagnons, Antoine Daniel, Jean de Brebeuf, Gabriel Lalemant, Charles Garnier, Noël Chabanel et l’Algonquin Joseph Onahare. Chaque martyr se voit ainsi attribué une partie de l’espace de la gravure, selon une progression dramatique partant d’un fond peu visible vers le premier plan, où l’horreur et la violence éclatent à la face du spectateur. Plusieurs «Passions» sont alors réunies, illustrant avec luxe de détails bourreaux et victimes, et surtout la nature des supplices (fusillé, brûlé, tué à coup de hache, ébouillanté, découpé en lanières), d’ailleurs décrits en latin dans la légende associée à la gravure.
Largement diffusés par les Relations Jésuites, les récits de martyres semblent avoir connu un certain succès en France, où se mêlaient probablement admiration devant le courage des missionnaires et voyeurisme face aux tortures qu’ils subissaient. Cette tradition de représentation du martyre est évidemment ancienne dans l’art religieux catholique. Cependant transposée en d’autres lieux et époques, elle identifie de nouveaux bourreaux: non plus Romains, Juifs ou Barbares, mais cette fois Indiens. Enfin, une dimension politique doit être aussi signalée : les meurtriers – Iroquois – ennemis des Français, sont soutenus et armés par les Britanniques.
De cette gravure est issu le grand tableau réalisé en 1925 pour l’Hôtel-Dieu de Québec, par Sœur Marie de l’Eucharistie (Elmina Lefebvre, 1862-1946), aujourd’hui au Musée de la Civilisation à Québec.